PLFSS 2024 : intervention de la ministre, Aurore Bergé, devant la Commission des affaires sociales
Mercredi 11 octobre, la Ministre des Solidarités et des familles, Aurore Bergé a présenté devant la Commission des affaires sociales, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 dans ses volets Familles et Perte d’autonomie. Son intervention est en ligne.
Intervention de la ministre des Solidarités et des Familles, Aurore Bergé
« C’est l’occasion de vous présenter ici les grands axes des politiques que je souhaite mener au service des familles de toutes les familles et de continuer à coconstruire avec vous les améliorations que nous pouvons encore apporter à ce texte. Le ministère des solidarités et des familles est bien celui qui est au cœur des services publics et du quotidien de nos concitoyens. Parce qu’il s’agit de nos enfants, de leur prise en charge et de leur protection, de nos aînés de leur maintien à domicile, des personnes en situation de handicap et de leur place au cœur de notre société et parce-que bien évidemment toutes les situations sont différentes, il s’agit d’apporter une attention particulière à ce que toutes les familles aient le plus de choix possibles dans le soutien que notre système doit pouvoir leur apporter.
A ce titre, je suis heureuse que ce projet permette trois grandes avancées.
D’abord nous renforçons le soutien et l’accompagnement de toutes les familles en cohérence avec ma conception universelle de la politique familiale, qui doit nous aider à relancer la natalité, priorité absolue de mon ministère.
Nous faisons grandir la Branche Autonomie pour relever le défi du vieillissement de la population et adapter surtout la société à ce défi majeur. Nous donnons de nouveaux moyens pour garantir l’inclusion et la participation des personnes en situation de handicap pour que le droit commun s’applique en fait à tous.
Les familles sont dans toutes les diversités les premiers maillons de notre société, creuset des apprentissages fondamentaux de la vie collective et de l’expression des solidarités. Le retour du terme « familles » dans la dénomination de mon ministère n’est pas un hasard. C’est bien la réaffirmation de cette priorité politique. Je souhaite m’inscrire dans la lignée de ce choix fort que notre pays a fait après la guerre : aider toutes les familles et s’en donner les moyens.
La Branche Famille dépense comme vous le savez plus de 50 milliards d’euros chaque année dans cet objectif avec une hausse en 2024 de l’ordre de 2 milliards d’euros. A mes yeux cette politique familiale est loin de se résumer à une simple politique de redistribution : c’est bien avant tout une politique universelle pour accompagner, simplifier la vie des familles et leur laisser plus de liberté et de choix. Pour mettre en œuvre concrètement cette politique familiale, le PLFSS intègre comme vous le savez à la fois des aides monétaires, je pense à l’allocation de soutien familial c’est-à-dire la pension alimentaire minimale dont nous avons augmenté le montant de 50% l’an dernier mais aussi de nouveaux moyens pour renforcer les services aux familles, simplifier leur vie et mieux répondre à leurs besoins tout simplement en respectant leur choix.
En 2024, les moyens consacrés à la politique familiale augmenteront notamment pour mettre en œuvre le chantier essentiel du service public de la petite enfance, qui vise à garantir à tout parent l’accès à une solution d’accueil de qualité, en toute sécurité, que ce soit en crèche, chez une assistante maternelle et évidemment de manière accessible financièrement. Ce sont ainsi 6 milliards d’euros, qui seront ainsi consacrés jusqu’en 2027 pour revaloriser nos professionnels de la petite enfance, premier maillon évidemment de cet accueil, soutenir l’investissement dans les crèches et engager la dynamique d’ouverture de 200 000 solutions d’accueil manquantes que ce soit en accueil collectif et en accueil individuel.
Parce qu’un enfant de 10 ans évidemment et j’espère heureusement ne se garde seul et que chaque famille doit pouvoir accéder aux solutions adaptées à sa situation, les moyens continueront à monter en puissance en 2025 comme vous le savez avec l’entrée en vigueur de l’extension de l’aide à la garde individuelle d’enfant pour les familles monoparentales et son adaptation pour toutes les familles afin que le reste à charge soit bien le même en accueil individuel et en accueil collectif : ce qui n’était pas le cas jusqu’alors.
Je veux m’assurer que ces moyens soient dépensés efficacement c’est-à-dire au service de la qualité de la prise en charge et de la sécurité de nos enfants. J’ai déjà eu l’occasion de le dire devant vous, il n’y aura pas un seul des 200 millions d’euros liés à la revalorisation des professionnels qui n’ira à des groupes qu’ils soient privés, publics ou associatifs s’ils ne tiennent pas les engagements pris notamment de relever par le haut leurs conventions collectives.
Enfin, je n’ignore pas l’écart grandissant entre le désir d’enfant et sa réalisation chez nos concitoyens avec une natalité en baisse tendancielle depuis 2011. Le service public de la petite enfance est un élément de réponse fort à ces enjeux et vous pouvez compter sur ma mobilisation pour continuer à convaincre sur ce sujet.
Les solidarités et la famille c’est évidemment tout au long de la vie, c’est pourquoi plus que jamais l’autonomie est au cœur de l’action de ce ministère. Au cœur des solidarités d’une part parce que derrière la question de l’autonomie se cache bien la prise en compte de toutes les fragilités et l’exigence de garantir effectivement les droits de chacun et d’assurer la pleine participation de tous à la vie collective.
Au cœur des familles d’autre part parce que toutes les familles sont concernées par la perte d’autonomie d’un enfant, d’un conjoint, d’une mère ou d’un grand-père et qu’il est donc de notre devoir d’accompagner ces familles et plus particulièrement de prendre soin de ceux qui prennent soin des autres : je pense aux 9 millions d’aidants dans notre pays.
Au cœur de mon action aussi parce que je suis convaincue que c’est collectivement que nous ferons face au défi si ce n’est au choc démographique en adaptant dès maintenant notre société au vieillissement. Je continue à rabâcher ces deux chiffres qui pour moi sont essentiels : en 2030, 1 Français sur 3 aura plus de 60 ans et pour la première fois de notre histoire les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans.
En cohérence avec cet engagement, l’objectif global de dépenses qui financent nos Ehpad et établissements pour personnes en situation de handicap augmentera de 4 % en 2024 soit plus que les 2,5 % d’inflation anticipée. Cette hausse importante des moyens traduit le respect de nos engagements envers les familles et envers les professionnels du secteur.
Ces engagements vous les connaissez : c’est d’abord le respect du libre choix des individus. Nous la savons la première demande des Français c’est pouvoir vieillir chez eux à domicile. C’est pour répondre à leur volonté que nous avons entrepris ce que nous appelons le virage domiciliaire, c’est la question de l’adaptation de nos logements avec MaPrimeAdapt’ qui entrera en vigueur dès 2014, ce sont des moyens nouveaux dans ce PLFSS 2024 pour développer de nouveaux centres de ressources territoriaux. Enfin décloisonner les interventions auprès des personnes âgées à domicile et simplifier leurs démarches et celles de leur famille. C’est la dynamique du service public départemental de l’autonomie, objectif : un guichet unique, un accueil physique, humain partout mettant fin au parcours du handicap trop souvent décrié par les familles que ce soit pour les personnes âgées que ce soit pour les personnes en situation de handicap.
Ce grand projet de simplification que nous portons depuis le début de la mandature, encré au cœur de nos territoires commence à se concrétiser : l’appel à manifestation d’intérêt auprès des conseils départementaux a été adressé dès ce mois de septembre.
Par ailleurs et dans le prolongement des réformes structurelles que nous menons pour développer et accompagner les services à domicile, des moyens supplémentaires sont dédiés à leur montée en charge pour soutenir nos aides à domicile. Métier essentiel, 99 % sont portés par des femmes et qui atteint un taux de pauvreté de 18 %, ce qui signifie que, oui, il est plus qu’urgent de continuer à les revaloriser et que chacun s’y engage Etat et Départements.
L’instauration d’un tarif plancher national pour l’aide à domicile : il était d’abord fixé à 22 € en 2022 puis augmenté à 23 € en 2023. La création d’une dotation supplémentaire de 3 € dédiée à la qualité du service rendu, la création de 25 000 nouvelles places SSIAD d’ici 2030, les 2 heures supplémentaires par semaine dédiées à l’accompagnement et au lien social pour les personnes isolées.
Nous continuons de développer sur l’ensemble de notre territoire aussi des structures d’habitat intermédiaire, je pense notamment aux accueils familiaux qui permettent de proposer un accompagnement très proche du domicile. Pour consolider, assurer la qualité de l’offre d’accompagnement des personnes âgées en établissement, le PLFSS 2024 concrétise surtout une nouvelle étape dans l’objectif de création de 50 000 postes supplémentaires dans les Ehpad avec une augmentation doublée par rapport à celle de 2023 puisqu’il s’agira du recrutement d’environ 6 000 professionnels soignants supplémentaires l’année prochaine.
Recruter vous le savez ce n’est pas qu’une question de hausse des moyens dans un PLFSS c’est surtout une question d’attractivité des postes et des carrières. C’est pour cela que j’ai obtenu que les aides-soignants et les infirmiers en établissements publics bénéficient de la même revalorisation pour le travail de nuit et les jours fériés que leurs collègues dans les établissements publics sanitaires. Sanitaire et médico-social doivent évidemment avancer de concert.
Enfin au-delà des enjeux strictement financiers qui nous concernent aujourd’hui, ce PLFSS prend la mesure de l’urgence dans laquelle se trouve le secteur des Ehpad. C’est pourquoi il prévoit une réforme structurante à partir de 2025 : la possibilité laissée aux départements et je dis bien la possibilité qui leur est laissée de fusion entre les sections soins et dépendance ce qui permettra un soutien financier direct aux départements et aux Ehpad les plus en difficultés. Pour les départements qui le souhaitent et en lien avec les besoins de soins croissants des résidents, c’est donc la sécurité sociale qui financera ainsi la section dépendance des Ehpad. Ce soutien financier est primordial parce que nous savons tous ici que des situations difficiles presque insoutenables existent pour nombre de nos établissements partout sur nos territoires. Il s’agit là d’une dynamique vertueuse pour les personnes comme pour la soutenabilité de notre système social avec des frais de soins évités.
Je souhaite enfin pouvoir avancer sur la question des fonds de concours aux départements en lien avec la CNSA. J’ai eu l’occasion de le dire en conseil d’administration de la CNSA. C’est un chantier complexe mais je crois qu’il est temps que nous assumions de le commencer car 12 fonds de concours aujourd’hui au sein de la CNSA, l’illisibilité de ces fonds et des politiques menées, l’empilement successif n’a pas aidé à la prise de conscience nécessaire sur le choc démographique, qui est devant nous.
Ce PLFSS est également un texte de mise en œuvre de nos engagements concernant le handicap notamment ceux directement annoncés par le Président de la République lors de la dernière Conférence national du handicap. Nous concrétisons ainsi la création de 50 000 solutions pour les personnes en situation de handicap et pour leurs proches et volontairement ce sont bien des solutions mises au pluriel parce que nous devons veiller à toujours répondre aux besoins dans toute leur diversité et je pense notamment à nos enfants. Une inclusion qui ne soit donc pas uni-solution mais bien multi-solutions pour garantir par exemple à chaque enfant le droit à une scolarité y compris en milieu ordinaire et en institut médicoéducatif. Assurer une prise en charge adaptée aux enfants en situation de handicap placés à l’ASE puisque 20 % d’entre eux seraient des enfants en situation de handicap. Nous renforçons les moyens des centres d’actions médicosociales précoces dès 2024. Nous engageons une mesure clé pour 2025 : la création d’un véritable service de repérage, d’orientation, de prise en charge unifiée de toutes les situations autour du handicap pour les enfants de 0 à 6 ans. Ce dispositif doit permettre d’en finir avec l’errance des familles et de lutter contre les pertes de chance de nos enfants dans cette logique de prévention.
Je conclurai pour ma part sur un élément dont je crois que collectivement l’on pourrait se réjouir, le franchissement d’une nouvelle étape, lorsque nous avons voté ensemble en 2020 la création de la branche autonomie. A partir du 1er janvier 2024 vous le savez 0,15 point de CSG soit 2,6 milliards d’euros viendront abonder les ressources de cette 5e branche. Ce sont notamment ces moyens qui nous permettront de tenir les engagements pris et nous consommerons la moitié du surplus dès 2024.
Enfin accompagner les plus fragiles c’est évidemment accompagner leurs proches. Nous avons le devoir de prendre soin de ceux qui prennent soin des autres car devenir aidant c’est non seulement une responsabilité mais on le sait c’est aussi une charge physique, mentale extrêmement lourde à porter. Avec la nouvelle stratégie que nous avons présentée avec Fadila Khattabi, nous permettons d’amplifier le soutien nécessaire aux aidants, garantir quoiqu’il arrive 15 jours de répit comme nous nous y étions engagés, garantir des plateformes de répit partout sur le territoire, créer 6 000 nouvelles solutions d’accueil et de répit permettant d’ici 2027 d’avoir 40 000 solutions partout sur notre territoire. C’est un pas essentiel car je crois qu’il y a 10 ans le mot « aidant » n’existait pas. Ce mot est aujourd’hui reconnu avec des droits qui y sont attachés et des droits qui sont renforcés grâce à vous dans ce PLFSS.
Je vous remercie. »